Nicole voit bien que Jean n’est pas en forme. Depuis sa fracture de la jambe l’été dernier, il n’arrive pas à récupérer. Elle l’aide tant bien que mal à monter les escaliers et à organiser de petites sorties pour prendre l’air. Parfois, elle l’aide même à prendre sa douche alors qu’elle n’est pas du tout à l’aise pour faire cela. Bref, en plus de tout son quotidien habituel, à 71 ans, Nicole a dû se mettre aux petits soins pour Jean…
Mais Jean n’est jamais vraiment satisfait : « pas assez ci », « trop de cela », « non, pas comme ça »… et la tension monte dans le couple. Nicole et Jean n’en peuvent plus : « Nous nous sommes mariés pour le meilleur et pour le pire, maintenant nous avons le pire ! ». Nicole a besoin de recharger ses batteries. Elle fait alors appel à APAMAD : « Un relais professionnel me permettra de retrouver notre complicité perdue. J’aimerais retrouver du temps pour moi, et cela sera aussi mieux pour Jean. » se dit-elle.
Le rendez-vous est pris, Hakima Qeqeh d’APAMAD se rend au domicile de Nicole et Jean pour étudier leur situation : les services à domicile dont ils auraient besoin, les aides financières auxquelles ils pourraient avoir droit… Nicole est ravie, pose plein de questions pour être bien sûre que tout se passera bien. Jean reste silencieux durant toutes les explications. Le feu vert de Nicole « D‘accord, mettons donc en place une aide à la douche pour Jean et une aide au ménage pour me soulager moi » déclenche alors la colère de Jean : « Hors de question, Nicole continuera à m’aider. On n’a besoin de personne pour le ménage, ça ira très bien finalement ».
Accepter de se faire aider n’est pas facile. Hakima prend le temps d’échanger, comprendre les freins de Jean, expliquer différemment. Puis elle s’est éclipsée respectueusement, laissant le couple réfléchir à sa situation. Nicole et Jean ont longuement échangé, ont laissé passer la semaine, et ont rappelé APAMAD pour mettre l’aide en place.
Hakima n’est pas surprise, elle rencontre régulièrement cette situation. « Une aide efficace ne peut pas être imposée, elle doit être choisie, en douceur. Je prends aussi le temps d’expliquer la situation à l’aide à domicile qui interviendra. Nos aides à domicile ont vraiment à cœur de respecter les personnes qu’elles aident. Et leur humanité, leur enthousiasme, font que tout se passe bien.»
Le point de vue des psychologues
Y a-t-il un protocole à suivre lorsqu’une personne refuse catégoriquement d’être aidée ?
« Surtout pas ! Il faut agir au cas par cas, l’important est de rencontrer la personne à aider mais aussi le ou les aidants, pour avoir une vision globale », explique Rita Cano, psychologue au sein du Réseau APA. « Aucune situation ne se ressemble : il y a un passé, des histoires de vie et des profils tellement différents qu’on ne peut pas juste débarquer chez les gens avec une grille d’évaluation », renchérit Soledad Gerard, également psychologue, au sein d’APAMAD. « Parfois ce qui marche chez une famille ne marche absolument pas chez une autre, il faut s’adapter », explique-t-elle.
« La clé est de toujours garder la personne au centre », explique Rita Cano. C’est un processus qui demande du temps, de la communication et beaucoup de compréhension.« Il faut déterminer pourquoi la personne refuse l’aide, entendre sa position et expliquer, argumenter pour qu’elle comprenne en quoi une aide extérieure est nécessaire », poursuit la psychologue « encore une fois l’important est d’écouter, surtout ne pas juger».